Un métier d’autrefois : l’employé d’octroi

Mon arrière-arrière-grand-père, Maurice Alexandre OGIER (1837-1891) exerçait, à la fin de sa vie, le métier d’employé d’octroi, ainsi qu’il est indiqué dans le recensement de 1891 de la commune de Givors (Rhône, 10 857 habitants en 1891).

extrait recensement 1891 Givors, Rhône (source : Archives départementales du Rhône)

extrait recensement 1891 Givors, Rhône (source : Archives départementales du Rhône)

Les octrois étaient des impôts que les communes étaient autorisées à percevoir sur certains objets destinés à la consommation locale, pour faire face  à leurs dépenses.

Les octrois existaient déjà sous l’Ancien Régime, ils furent supprimés par l’Assemblée constituante (1791), au grand détriment des communes, qui se trouvaient privées des ressources indispensables aux services dont elles avaient la charge. Les octrois furent rétablis, à Paris d’abord, puis dans quelques autres communes, et enfin d’une façon générale, par les lois du 27 vendémiaire an VII, 27 frimaire et 5 ventôse an VIII.

Les octrois étaient, par leur nature, de véritables contributions indirectes, perçues, au profit des communes, au lieu d’être perçues au profit de l’État. Il ne faut pas les confondre avec les « droits d’entrée », qui étaient établis, au bénéfice du Trésor Public, sur l’alcool et les liquides assimilés à l’entrée des villes d’une population de 4000 âmes et au-dessus.

Les employés d’octroi, douaniers en uniforme, étaient parfois appelés “gabelous” :

GABELOU, subst. masc. Péjoratif

  1. HIST. Employé de la gabelle (cf. gabeleur rem. s.v. gabelle); p. ext. employé de l’octroi. Faire relâcher un malheureux traîné en prison, parce que les gabeloux ont trouvé chez lui quatre livres de sel (Erckmann-Chatrian, Hist. paysan, t. 1, 1870, p. 77).
  2. Employé de la Douane ou de l’administration des Contributions Indirectes. Je le dis sans traîtrise [qu’il est contrebandier] … car il ne s’en cache pas, il s’en vante au nez des gabelous (Sue, Myst. Paris, t. 1, 1842, p. 128).
Des employés d'octroi vers 1920 à Camon (Somme)

Des employés d’octroi vers 1920 à Camon (Somme) (source)

Les tarifs d’octroi variaient avec les localités. Le décret du 12 février 1870 contenait un tarif général, donnant la nomenclature des divers objets susceptibles d’être soumis à l’octroi. Ces objets étaient répartis en six catégories : boissons et liquides, comestibles, combustibles, fourrages, matériaux, objets divers.

Par exemple, selon les tarifs de l’octroi municipal de la ville de Lyon pour l’année 1842, il fallait s’enquérir de 9 Frs pour passer un cochon ou un sanglier.

Les limites du territoire auquel la perception s’étendait devaient être indiquées par des poteaux portant ces mots : « Octroi de…« . On trouve encore quelques uns de ces poteaux aujourd’hui :

Ancienne borne située sur la rive droite du Tarn, à l'entrée de Montauban.

Ancienne borne située sur la rive droite du Tarn, à l’entrée de Montauban.
(© Jean-Claude Morlhon, source)

 

Panneau d'octroi à Étampes (Essonne)

Panneau d’octroi à Étampes (Essonne)

… ainsi que certains bâtiments qui abritaient les bureaux, comme ici à Levallois-Perret.

Pour peser les voitures et fixer le poids des marchandises qu’elles portaient, on les faisait passer sur la plate-forme d’une bascule. Cette plate-forme, à l’aide d’un levier, soulevait le fléau d’une balance qui se trouvait à l’intérieur du bureau d’octroi, et l’employé lisait, sur le bras de fer, le nombre de kilogrammes.

A Givors, les bureaux de l’octroi, installés en mai 1887, étaient situés à l´entrée du “Pont de Chasse”, pont sur le Rhône reliant les communes de Chasse/Rhône à Givors. Mon aïeul, Maurice Alexandre OGIER, devait travailler dans ces maisonnettes à l’entrée du pont.

Givors (Rhône) - Pont de Chasse

Givors (Rhône) – Pont de Chasse

Givors, le pont de Chasse aujourd'hui (source : Google Street View)

Google Street View

[EDIT 10/09/14] Merci à Elisa de m’avoir signalé que les deux maisonnettes existaient toujours! La preuve en images :

Ces taxes furent toujours mal acceptées par la population et furent, dès la fin du XIXe siècle, l’objet de violentes critiques. Elles gênaient alors le développement d’une économie moderne. Supprimées à la fin de la deuxième guerre mondiale (loi n° 379 du 2 juillet 1943, confirmée en 1948), elles furent remplacées par le relèvement de taxes locales sur les ventes au détail et prestations de services.

Le plus célèbre des employés d’octroi est sans conteste le peintre Henri Rousseau, qui fut surnommé “le douanier Rousseau” en rapport avec son métier de préposé à l’octroi de Paris.

Sources

8 réflexions sur “Un métier d’autrefois : l’employé d’octroi

  1. Bon, je ne vais pas refaire les louanges de cet article que j’avais déjà lu en exclusivité avant sa publication mais tout de même, il aurait vraiment sa place en guise de chapitre dans un livre d’histoire sur les métiers anciens !! 🙂

    J’aime

  2. Pingback: Un métier d'autrefois : l'employé...

  3. Pingback: La famille Peyron à Chalain-le-Comtal | Des Aïeux et des Hommes

  4. bonjour,
    dans mon mémoire familiale, j’ai découvert un ancetre, qui, sur son acte de mariage de 1952, ce qui n’est pas tres loin par rapport a votre epoque citée, qui exerçe le métier de : « controleur des contributions indirectes », peut-on dire que c’est le meme métier que « employé d’octroi » ? donc que ce métier est soit rattaché a l’administration des impots ou des douanes ? merci

    J’aime

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.